Nouvelle orientation Passer des vaches aux chèvres bio
Après la crise laitière de 2015, Élisabeth et Jérôme Costeux ont décidé de remplacer les vaches laitières par des chèvres et de se convertir à l’agriculture biologique. Un changement qui a permis de retrouver du revenu et d’installer deux de leurs fils.
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Si quelques éleveurs des Hauts-de-France se sont tournés récemment vers le lait de chèvre bio, c’est grâce à la voie ouverte par Jérôme et Élisabeth Costeux, à Bellebrune, des pionniers dans le Pas-de-Calais. « En 2015, à cause de la crise du lait, nous n’avions plus aucune visibilité sur notre élevage, explique le père de famille. Le constat était d’autant plus dur que nos trois enfants avaient envie d’être agriculteurs. » L’idée des chèvres leur est venue de Loire-Atlantique. Un de leurs amis y avait monté un élevage et s’en sortait bien. Quelques jours de vacances dans un gîte au sein d’une autre ferme caprine, et le stage de Jean, leur deuxième fils, dans un élevage de chèvres bio de Bretagne ont fini par conforter leur nouvelle orientation.
Un contrat de livraison
« Nous ne pouvions pas partir avec du lait conventionnel, car nous n’avions pas de contrat de livraison et, localement, le marché du lait transformé était mature, souligne Élizabeth Costeux. Nous ne souhaitions par ailleurs pas transformer le lait à la ferme et nous mettre à la vente directe, car c’est un autre métier. Nous avons donc cherché un débouché en bio. » Leurs recherches les conduisent auprès d’Eurial, la branche lait de chèvre de la coopérative Agrial. « Nous nous sommes tournés vers notre coopérative, La Prospérité fermière Ingrédia, qui était ouverte à ce type de projets et a fait le lien avec Agrial », indique Jérôme. C’est ainsi que l’aventure avec les chèvres a démarré.
Le Gaec de La Villeneuve a opté pour la race saanen. Les chèvres ont été accueillies dans l’ancienne stabulation des vaches laitières de 2 650 m2. Elles ont un accès direct aux prairies permanentes qui entourent la ferme. © Blandine Cailliez
Les 120 premières chevrettes arrivent sur l’exploitation en octobre 2017. Les éleveurs vendent progressivement leurs 80 vaches holsteins, convertissent leur ferme au bio et transforment eux-mêmes leur salle de traite de 2 × 6 pour les vaches en 2 × 22 pour les chèvres. Le troupeau s’agrandit en plusieurs étapes, pour atteindre 600 chèvres.
Les associés remplacent la rotation blé, maïs fourrage et betteraves fourragères en conventionnel par du méteil et des prairies temporaires en bio. « Pour l’ensilage, le méteil est composé de triticale, avoine, pois protéagineux et vesces. Quand ce mélange est récolté en grain, à ces mêmes espèces, on ajoute des féveroles », précise Jérôme Costeux.
Auparavant, l’exploitation vendait une partie du blé à l’extérieur. Désormais, la totalité de la surface en culture est destinée à l’alimentation des animaux. Dix chèvres consomment à peu près l’équivalent d’une vache. Leur ration est complétée par du foin produit et des protéines bio achetées (luzerne ou soja). Les saanens du Gaec produisent environ 1 000 l/an, un peu plus que la moyenne de la race dans la région, qui s’établit à 840 l. La coopérative La Prospérité fermière collecte le lait qui est expédié dans les Deux-Sèvres chez Agrial, pour être transformé en fromages frais ou bûchettes Soignon. Les éleveurs gardent les chevrettes et vendent les chevreaux, soit à deux mois à l’abattoir de Bailleul (Nord), soit quelques jours après la mise bas à un éleveur engraisseur de l’Oise.
Côté cultures, pour la fertilisation, en plus du fumier, ils achètent des vinasses, écumes de sucreries et fientes de volaille. « En bio, c’est le désherbage qui pose le plus de soucis, remarque Émile, le fils aîné. Nous intervenons souvent avec une herse étrille ou une bineuse, selon les cultures et leur stade, avec jusqu’à huit passages dans les parcelles de maïs. »
Une sérénité retrouvée
L’objectif de la famille est de passer à 1 000 chèvres traites d’ici un an ou deux et, à terme, à 1 200. Le Gaec est pour cela en train de construire un nouveau bâtiment de 580 m2 et une toute nouvelle salle de traite, un manège roto-traite de 72 postes. Les quatre membres de la ferme sont satisfaits de leur choix. « Nous avons retrouvé du revenu et je me sens libéré, souligne Jérôme Costeux. Nous savons où nous allons et l’exploitation va pouvoir se poursuivre avec nos trois enfants. » Le chiffre d’affaires a presque doublé en quatre ans sur la même surface, avec un objectif encore en progression.
Quant aux chèvres, elles ont séduit Jérôme et Élizabeth : « Ce sont des animaux agréables, beaucoup plus propres que les vaches. »
Blandine Cailliez
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